HOMEOPATHIE ET ENNEAGRAMME

Diagnostic du miasme et du règne basé sur l'ennéagramme

Introduction
Dans l'année 1828, Hahnemann, publia sa première édition des maladies chroniques[1]. Cette publication allait révolutionner l'histoire de l'homéopathie. Les deux découvertes avancées du fondateur reposaient sur l'application de la dose liquide et la théorie des miasmes. Il prédit, un an avant la parution de son livre que l'annonce de ses découvertes allait produire l'effet d'une bombe : "Il leur faudra plus de 6 mois pour se remettre de leur frayeur et de la stupéfaction liée à l'énormité de cette nouveauté, peut-être encore six mois avant qu'ils n'y croient…"[Vie et Lettres d'Hahnemann d'après Bradford, p. 182]

"Sa prédiction s'avéra juste, mais des centaines de fois pire", nous dit l'excellent historien de l'homéopathie, David Little. En effet, certains et non des moindres, refusèrent de quitter les terres connues pour s'aventurer vers les territoires inconnus que défrichait Hahnemann. Hering lui-même, dit dans l’introduction à la 3° traduction américaine de l’Organon : "Quelle influence importante peut avoir l’adoption ou non par un homéopathe des opinions théoriques de Hahnemann, dans la mesure où il s’en tient aux principaux outils du Maître et à la matière médicale de nos écoles ? Quelle influence cela peut-il avoir, qu’un médecin adopte ou rejette la théorie psorique, dans la mesure où il sélectionne le remède le plus semblable possible?".

En réponse à la citation ci-dessus de Constantine Héring, J.H. Allen répondait : "nous ne pouvons pas sélectionner le remède le plus semblable possible, sans avoir compris le phénomène des miasmes actifs et basiques ; car le vrai simillimum est toujours basé sur le miasme actif existant. Je prétends que la majorité de nos échecs pour choisir le vrai simillimum réside dans l'incapacité à diagnostiquer le miasme actif."

"Hahnemann avait groupé ses remèdes anti-psoriques, et parmi ceux-ci il faisait sa sélection [pour un cas psorique]."[2]

A notre époque encore la théorie miasmatique est source de divergence pour les homéopathes et son application reste laborieuse.

Que nous dit cette théorie ? Nous pouvons la résumer en deux points :

-La globalité du malade
-La nature miasmatique des maladies.

Si la globalité du malade est maintenant une des clés de voûte de la doctrine homéopathique moderne, nous n'envisagerions plus de traiter un rhumatisme, en utilisant les seuls symptômes locaux, la nature miasmatique des maladies reste inexploitée.

C'est ce point que nous allons tenter d'éclaircir dans cet exposé.


Les maladies chroniques

Le modèle anthropologique homéopathique
Pour comprendre la découverte de Hahnemann sur les miasmes, il nous faut revenir sur sa conception de l'être humain. Le modèle utilisé par Hahnemann pour décrire l'être humain est un modèle triparti qui comprend l'énergie vitale, le corps et l'esprit, ainsi qu'il le décrit dans l'Organon §9 : " Dans l'état de santé, l'énergie vitale (souveraine) immatérielle - Dynamys - animant la partie matérielle du corps humain (organisme), règne de façon absolue... L'esprit doué de raison qui habite cet organisme peut ainsi librement se servir de cet instrument vivant et sain, pour atteindre au but élevé de son existence."

Le concept d'énergie vitale est fondamental car il sous-tend tout l'édifice doctrinal, depuis la compréhension du processus de santé/maladie jusqu'à l'action du médicament dynamisé.

Si à notre époque c'est la vision purement mécaniste et linéaire de la maladie qui fait foi, l'homéopathie s'appuie sur une vision radicalement différente, globale, intégrant le corps, l'esprit et l'énergie vitale. Cette conception tire ses racines dans les théories de la médecine grecque ancienne (Hippocrate, Gallien) et de la médecine spagyrique (Paracelse).


Définition de la maladie
* Classification des maladies chroniques dans l'Organon.
Hahnemann dans l'Organon § 72 décrit deux types de maladies chroniques :
1. Celles déterminées par une cause externe :
= Iatrogéniques : causée par une intoxication médicamenteuse chronique,
= Circonstancielles : causée par des fautes d'hygiène physiques ou morales, la pollution, les virus, le stress, etc…

2. Celles déterminées par une cause interne, dites "naturelles" : "celles qui laissées à elles-mêmes et non traitées par des moyens spécifiques, sont incessamment progressives" §78.

Le propos de cet article concerne uniquement les maladies chroniques naturelles.


* La maladie est une altération dynamique du principe vital.
Hahnemann nous dit § 12 : " c'est uniquement la rupture d'équilibre de l'énergie vitale qui est la cause des maladies ".

Il veut nous signifier par-là qu'il n'y a pas de cause matérielle à la maladie, ainsi que la théorie médicale en vigueur le clame. Le microbe n'est pas la cause de la maladie mais juste un agent circonstanciel. Les symptômes manifestent ce déséquilibre, c'est-à-dire, qu'ils en sont la partie visible.
A l'origine de la maladie il y a donc une atteinte d'emblée globale et non locale de l'organisme. Cette notion de globalité ne peut être véritablement comprise sans celle d'énergie vitale. En bref, quand nous parlons maladie, nous pouvons comprendre déséquilibre énergétique.

Mais si nous comprenons que la maladie résulte ou plus exactement traduit une rupture d'équilibre de l'énergie vitale, quelle peut être la cause ou la nature de cette rupture ?


Nature miasmatique des maladies chroniques naturelles
Hahnemann nous explique que la nature des maladies chroniques naturelles est miasmatique : "La maladie originale est d'une nature miasmatique chronique" (Les maladies chroniques, trad. anglaise Tafel, page 6) Il nous dit également au § 78 de l'Organon que ces maladies "proviennent d'agents infectieux chroniques ou miasmes".

Nous allons essayer de comprendre le sens qu'attribue le fondateur au mot miasme. En effet les termes qu'il emploie prête à confusion.

Pour Hahnemann l'influence "dynamique" d'un agent perturbant la force vitale est caractérisé par une action "sans la moindre parcelle matérielle". C'est ainsi qu'il range au même niveau la contagion infectieuse comme la rougeole, l'action du magnétisme minéral et celle des médicaments dynamisés : "C'est dynamiquement, à la façon d'une contagion que l'influence des médicaments se produit sur notre organisme et cela sans la moindre parcelle matérielle de la substance médicamenteuse" [note a du § 11].

La notion de contagion infectieuse est clairement dans l'esprit de Hahnemann une notion dynamique et immatérielle.

Nous pourrions dans le langage de Hahnemann remplacer le mot "infectieux" par "dynamique".

Le miasme est donc un agent qui exerce une action dynamique ou énergétique délétère sur l'organisme.

Hahnemann nous dit que la principale source de "transmission" miasmatique est héréditaire : "la psore s'est transmise de génération en génération au travers de millions d'organismes humains" §81 et note a du § 284 : "la psore a presque toujours été transmise par hérédité".

Il devient alors clair que le miasme est un déséquilibre fondamental inné de l'énergie vitale.

Arrivé à ce stade de la compréhension, nous sommes toujours dans la globalité du malade, avec un modèle théorique captivant certes, mais qui finalement ne change pas grand chose à notre pratique.

Nature spécifique du miasmeCela devient intéressant quand Hahnemann pousse plus loin ses investigations. Il nous livre dans les "maladies chroniques" sa dernière découverte, celle qui devait avoir "l'effet d'une bombe" et qui effraya bon nombre de ses contemporains et successeurs : il n'existe que trois miasmes ou déséquilibre énergétiques fondamentaux la psore, la sycose et la syphilis.

Il en découle en conséquence que le déséquilibre énergétique est spécifique d'un miasme.

Cette spécificité énergétique implique une spécificité de symptômes. Chaque miasme possède donc des caractéristiques symptomatiques propres.

Hahnemann considérait la psore comme universelle et mère de quasiment toutes les maladies, la sycose et la syphilis étant pour lui beaucoup moins fréquentes. Cependant, les successeurs de Hahnemann ont tous admis (Allen, Kent) que les trois miasmes étaient équivalents en fréquence et pouvaient coexister dans un même organisme et s'intriquer.


Caractéristiques du miasme d'après Hahnemann et J.H. Allen:
* Trois miasmes basiques (psore, sycose, syphilis) s'intriquent dans chaque personne.
* Ces miasmes sont trois types de déséquilibres innés de l'énergie vitale et sont à l'origine de toutes les maladies.
* Un des trois miasmes va prédominer de façon constitutionnelle et innée.

Il existe cependant toujours un miasme actif et prédominant, les deux autres étant latents ainsi que l'explique longuement J.H. Allen dans "psora and pseudopsora".


Traitement des maladies chroniques naturelles

La "bombe" des miasmes changea le paradigme du modèle conceptuel homéopathique. Hahnemann continua dans son raisonnement : s'il existe trois miasmes avec des caractéristiques cliniques spécifiques, il existe aussi des remèdes qui s'adaptent spécifiquement à chacun de ces trois déséquilibres.

La similitude miasmatique
Pour traiter les maladies chroniques naturelles, il convient de diagnostiquer le miasme prédominant, puis de " choisir, [pour un malade où le miasme psorique prédomine] parmi les antipsoriques, ceux dont les symptômes pathogénésiques correspondront le mieux à ceux [caractéristiques, nda] du malade." Note a §80.

Dès lors, deux étapes deviennent essentielles pour le médecin homéopathe : le diagnostic du miasme et la recherche des symptômes caractéristiques.

Le postulat de base est donc le suivant : derrière les symptômes du malade il y a un miasme sous-jacent. Sans le diagnostic de ce miasme, il est très difficile de trouver le simillimum. Le remède doit, en effet, appartenir à la classe anti-miasmatique correspondante.

Cela s’appelle la similitude miasmatique.

Ainsi Sulfur ne pourra pas guérir un malade sycotique, ni Natrum sulfuricum guérir un malade psorique.

Kent utilisait cette notion :
" L’asthme, quand il est héréditaire, est une des maladies sycotiques d’Hahnemann … Pendant des années, je suis resté perplexe quant au traitement de l’asthme. Quand une personne me demandait " Docteur , pouvez-vous guérir l’asthme ? " Je disais " Non ". Mais , maintenant, je commence à être plus à l’aise depuis que j’ai appris que l’asthme est une maladie sycotique, et depuis que j’ai utilisé de façon judicieuse ces anti-sycotiques, je suis capable d’améliorer ou de guérir un grand nombre de tels cas. Vous découvrirez dans l’histoire de la Médecine, que lorsque des cas d’asthme ont été guéris, cela le fut grâce à des remèdes anti-sycotiques. C’est une des premières choses que j’ai observée, qu’en dehors de ces remèdes, vous ne parviendrez que rarement à la guérison d’un asthme. " Kent : Lectures de la Matière Médicale.


Dans un cas similaire, un étudiant ne connaissant pas les miasmes, pourra donner Sulfur en regroupant de façon mécanique un complexe symptomatique évoquant ce remède, alors qu'en réalité le cas est sycotique, et nécessiterait Natrum Sulfuricum.

La connaissance du miasme d’un malade nous permet donc de prédire quels remèdes vont être appropriés et quels remèdes sont à proscrire avec une grande précision.
Les trois dimensions d’un type ou terrain en homéopathie pourraient être définies comme suit :
*longueur = groupe de symptômes
*largeur = globalité du malade
*profondeur = type miasmatique

Ces trois dimensions correspondent aux trois niveaux de similitudes qu’Hahnemann a définis dans son parcours.
Le premier niveau de similitude à ses débuts était une similitude symptomatique, qui fonctionne bien pour les cas aigus, mais qui a une action palliative/suppressive sur un cas chronique.
Le second niveau de similitude fut ensuite une similitude globale sur la totalité du malade. Hahnemann la considérait comme indissociable du troisième niveau. Pour différentes raisons abordées plus haut, la plupart des homéopathes contemporains en sont restés à ce niveau. L'action reste palliative/suppressive.
Le troisième niveau est la similitude miasmatique qui inclut les deux autres et représentent le niveau ultime de similitude en homéopathie, l’aboutissement des travaux de Hahnemann.

La similitude miasmatique
* A chaque miasme s'adapte un certains nombres de remèdes spécifiques qu'Hahnemann a nommé "anti-miasmatiques" (ex. : Sulfur pour la psore, Thuya la sycose et Mercurius la luèse).
* Pour trouver le remède constitutionnel, il faut donc devant chaque malade rechercher quel est le miasme prédominant et choisir le remède dans la classe correspondante. (ex. : Sulfur ne pourra jamais convenir à un malade sycotique, ni Natrum Sulfuricum à un malade psorique)
=== Cela s'appelle la similitude miasmatique.

Nous découvrirons au cours de cet exposé un quatrième niveau de similitude : la similitude de règne.

Critères diagnostic des miasmes
Hahnemann nous a laissés dans sa théorie des trois miasmes, une ébauche de carte du territoire humain. Il a listé dans les "maladies chroniques" une série impressionnante de symptômes appartenant à la psore. Malheureusement la description que fait Hahnemann de la psore est tellement touffue qu'il est impossible de l'utiliser pour établir un diagnostic miasmatique. D'autre part, la sycose et la luèse n'ont été qu'effleurées, la description qu'en fait le fondateur est embryonnaire et se limite essentiellement à la description nosologique de ces maladies.

C'est pour palier à cette insuffisance que les homéopathes ont tenté de clarifier les critères diagnostic des miasmes. C'est ce que nous allons voir dans le chapitre suivant par un historique des principales figures homéopathiques ayant travaillé sur le sujet.


Historique depuis Hahnemann jusqu'à nos jours
Le plus grand maître concernant les miasmes fut incontestablement John Henry Allen (1854-1925). Son livre "Psora and pseudopsora" est une référence.

Il y eu ensuite Proceso Sánchez Ortega, médecin mexicain contemporain qui écrivit en 1944 sa thèse de doctorat en médecine sur les miasmes et publia "notes on miasms" (traduction anglaise par Harris Coulter 1980). Il commença a moderniser la notion de miasme notamment en donnant des caractéristiques synthétiques pour chaque miasme.

Alfonso Masi Elizalde est un homéopathe argentinien contemporain. Il fondé en 1981 l'Institut des Hautes Etudes Homéopathiques James Tyler Kent. Il est un esprit très créatif et brillant. Pour lui le miasme est une attitude psychodynamique existentielle.

Didier Grandgeorge, pédiatre homéopathe français, contemporain, fondateur en 1980 de l'Ecole Hahnemannienne de Fréjus-St Raphaël. Il a fait un parallèle intéressant entre les miasmes et la psychanalyse qu'il a nommé la psychanalyse des miasmes.

Max Tétau, ("Les diathèses homéopathiques", Editions Similia, 1996.) porte-parole de l'homéopathie à la française, dite pluraliste, est certainement un de ceux qui à la suite de Antoine Nebel et Léon Vannier ont le plus contribué au perfectionnement de la connaissance des miasmes dans l'esprit hahnemannien.

Rajan Sankaran, figure de prou de l'homéopathie indienne, imprégné de culture hindouiste, nous donne une vision et une compréhension de la maladie très profonde. Pour lui le miasme se situe sur le plan de l'esprit.

Au terme de ce voyage dans le temps, nous voyons que chaque homéopathe a élaboré sa théorie et tenté d'appliquer à sa façon la doctrine des miasmes. Il faut dire que la plupart des homéopathes modernes n'emploient pas de façon régulière et systématique les miasmes, et se borne à rester au niveau de la similitude de niveau deux. D'une certaine façon, c'est une attitude prudente, car plutôt qu'utiliser des outils peu fiables il vaut mieux perfectionner l'outil dont on dispose. C'est ce qu'ont fait les homéopathes contemporains, en développant la compréhension profonde de chaque remède par la recherche d'un noyau central. Masi est celui qui a ouvert la brèche dans ce sens, les autres s'y sont engouffré à sa suite (Vitoulkas, Sankaran, Brunson). En ce sens ils ont rendu un grand service à l'homéopathie, aux homéopathes et aux malades. Cependant, il reste encore à gravir la troisième marche de la similitude miasmatique, et bien que de nombreux auteurs s'y soient attaqués comme nous venons de le voir, cela reste encore très hermétique pour le praticien de base et bien difficile à mettre en pratique.


Méthodologie pour valider la démarche miasmatique

Les difficultés :
Le diagnostic miasmatique est très subjectif, difficilement reproductible. Les critères varient suivant les auteurs : ainsi pour Ortéga le psorique est en hypofonction alors que pour Sankaran il présente une hyperréaction au stress. La reconnaissance de ces critères chez le malade est éminemment subjective et aucune confirmation ne peut venir l'étayer.

La classification miasmatique des remèdes est aléatoire. Ainsi suivant les auteurs, le même remède va pouvoir se trouver dans des miasmes différents, voire appartenant aux trois miasmes. Exemple : Lycopodium est pour Hahnemann psorique, pour Allen sycotique et pour Ortéga tri-miasmatique. La raison de ces variations est que la détermination de la classification des remèdes par miasmes s'est fait par une compréhension intellectuelle à priori. J'ai mes critères de miasmes, je lis la matière médicale de tel remède et j'essaie de le classer par réflexion dans tel miasme. On devrait parler d'hypothèses de classification.

Vu le flou artistique qui entoure les critères diagnostic des miasmes en fonction des auteurs, comment atteindre une reproductibilité fiable?


Proposition de méthodologie pour l'étude des miasmes

1. Tout d'abord il faut s'entendre sur une base diagnostique commune à tous les auteurs : le dénominateur commun de chaque miasme retrouvé chez tous les auteurs.

2. Etablir ensuite une méthodologie de diagnostic miasmatique fiable, reproductible et indépendante (la plus indépendante possible) de la subjectivité du praticien. La conséquence de ce point, est que plusieurs praticiens entraînés doivent pouvoir sans se concerter aboutir au même diagnostic miasmatique et ce sur des centaines de cas.

3. Classification miasmatique des remèdes à posteriori : Prescrire le remède sans à priori, et s'il guérit le malade, mise en hypothèse à posteriori de ce remède comme appartenant à ce miasme. Après nombreuses vérifications cliniques similaires, classement de ce remède dans ce miasme.

A ma connaissance pour l'instant aucun auteur n'a posé le problème de cette façon ni ne respecte ces trois points.


Critères diagnostics des miasmes : base commune admise par l'ensemble de la communauté internationale.(d'après Allen surtout, puis Ortega, Grandgeorge, Masi, Tétau, Sankaran)
(voire schéma à l'article originel)


Découverte du lien miasme / ennéagramme

En lisant un petit livre du Dr Georges Broussalian, intitulé "Ma réussite en homéopathie[3]", je tombais sur un paragraphe parlant du traitement des affections hivernales chez les enfants. Georges Broussalian disait qu'il fallait associer au simillimum un remède adapté au miasme de l'enfant. Je n'avais jamais vraiment pratiqué de la sorte et ce paragraphe m'interpella. Il brossait en quelques mots les caractéristiques de chaque miasme.

"Il est utile si une intoxination psorique, luétique ou sycotique prédomine, de prescrire les homéodotes correspondants au terrain. Ainsi devant l'allergie prédominante, nous rechercherons un homéopsorique. Devant un vasculaire sanguin, coléreux violent, nous déterminerons un homéo-luétique végétal. Confronté à des condylomes, des verrues, des phobies, nous nous tournerons vers des homéosycotiques végétaux."

Expliqué d'une façon aussi simple, et non moins pertinente, l'analogie entre les caractéristiques des miasmes et celle des trois groupes d'un autre système appelé "ennéagramme" me sauta aux yeux.

Je travaillais depuis une dizaine d'année avec l'ennéagramme comme outil de connaissance de soi et des autres, j'avais bien fait quelques rapprochements entre certains remèdes homéopathiques et certains type ennéagramme, mais cette analogie entre miasme et groupe de l'ennéagramme me parut très profonde, pertinente et comme une porte ouverte. En effet, travailler avec les miasmes m'avait toujours paru difficile, principalement par une absence de consensus sur les critères diagnostics.

Et si l'ennéagramme pouvait m'éclairer sur ce point ?

Nous allons faire une brève description de l'ennéagramme pour vous permettre de comprendre la démarche.


L'ennéagramme : un modèle anthropologique


Historique :L'ennéagramme est un symbole très ancien, retrouvé chez Pythagore, représentant une étoile à 9 branches. Oscar ICHAZO, chercheur et philosophe bolivien a découvert dans les années 60 les clés pour l'application de ce symbole à l'être humain. Cette classification fut développée par Claudio NARANJO, psychiatre chilien dans les années 70. L'ennéagramme connaît actuellement un essor international important.



Le sceau de l'ennéagramme.

Définition :
L'ennéagramme est un outil de développement personnel et spirituel très puissant. Le modèle de la personnalité qu'il développ intègre les données suivantes :


* Les trois constituants
L'être humain est composé de trois constituants : cognition, émotion et pulsion. A chaque constituant est associé un ensemble de mots clés, dont voici quelques uns :

Constituant - Cognition - Emotion - Pulsion
Centre énergétique - Tête - Cœur - Abdomen
Emotion basique - Peur - Abandon - Colère
Stratégie de défense - Fuite - Séduction - Agression


La prédominance du déséquilibre d'un constituant détermine la constitution. Il existe donc trois constitutions de base.
*Les individus dont la constitution est dominée par l'émotion, sont très sensible à leur image, leur rôle dans la société, leur rapport avec les autres. Ils sont hypersensibles aux marques d'attention, et ressentent fortement toute forme d'abandon. D'un point de vue psychopathologique ils ont tendance à l'hystérie.
*Les individus dont la constitution est dominée par la cognition sont marqué par la peur et la fuite devant tout conflit. Ils se prennent facilement pour des victimes et ont tendance à rejeter l'origine de leur problème sur les autres. Ils ont une propension à mentaliser leur réalité. D'un point de vue psychopathologique ils ont tendance à la schizoïdie.
*Les individus dont la constitution est dominée par les pulsions sont dominé par un fort besoin de domination sur leur entourage. Leur émotion de base est la colère, et ils sont facilement irrité pour des broutilles avec des réactions comportementales viscérales et instinctives. Ils ont tendance à la destruction. D'un point de vue psychopathologique ils sont de tendance "épileptoïde" (selon une vieille nosologie, mais qui correspond bien à cette constitution).

Dans la science de l'ennéagramme chaque constitution présente trois types de déséquilibre :
(-)en carence = hypofonction,
(+)en excès = hyperfonction
(~)en perturbation = dysfonction.

Ce qui donne trois types de déséquilibre par constituants, donc 9 types, ou ennéatypes (ennéa = neuf en grec).

Constituants - Dysfonctions - Ennéatype - Passion - Vertu

Cognition - (+) - 5 - Avarice - Non attachement
............... - (~) - 6 - Peur - Foi
............... - (-) - 7 - Gloutonnerie - Sobriété

Pulsion - (+) - 8 - Convoitise - Innocence
............ - (~) - 9 - Inertie - Action
............ - (-) - 1 - Agression - Sérénité

Emotion - (+) - 2 - Orgueil - Humilité
............. - (~) - 3 - Duperie - Espérance
............. - (-) - 4 - Envie - Equanimité


* Les trois instincts

L'être humain comporte trois instincts principaux : social, syntonique et de préservation. Un des instincts sera prédominant constitutionnellement.

*L'instinct de conservation retient l'énergie à l'intérieur
*L'instinct social dirige l'énergie vers l'extérieur, le groupe ou l'autre
*L'énergie de l'instinct syntonique est centrée sur la charge générée par l'interaction de personne à personne dans les relations individuelles.

L'instinct va prendre neuf caractéristiques différentes suivant l'ennéatype. Par exemple, l'instinct syntonique se "colore" de la façon suivante dans l'ennéagramme :

Chaque personne présente de façon innée un ennéatype et un instinct dominant (sous-type instinctif) avec des caractéristiques corporelles, émotionnelles, cognitives et spirituelles spécifiques pour chacun, dont le détail dépasse largement le cadre de cet article. Mais pour vous donner un exemple Jacques Brel est de type 7 avec un sous-type syntonique. Lady Di est de type 1 avec un sous-type social.

L'appartenance au type et au sous-type est invariable. On ne change pas en cours de vie, pas plus qu'un grain de riz ne peut donner naissance à un épis de blé. Par contre, on évolue dans son type vers son essence.

Diagnostic :

L'auto-diagnostic est le plus couramment appliqué pour le développement personnel.

Le diagnostic par observation du patient est celui qui nous intéresse en tant qu'homéopathe. L'auteur de cet article a développé une méthodologie inédite de reconnaissance permettant chez quelqu'un d'entraîné d'effectuer le diagnostic en quelques minutes de façon fiable et reproductible.


Application de l'ennéagramme à l'homéopathie pour le diagnostic du miasme et du règne


1/ Les trois miasmes sont semblables aux trois constitutions de l'ennéagramme :
* Sycose = cognition
* Psore = émotion
* Luèse = pulsion

Les phobies et les obsessions de la sycose vont tout à fait bien avec le groupe des 5, 6 et 7 centrés dans le mental et la fuite.

La colère et la violence destructrice de la luèse correspondent bien avec le groupe des 8, 9 et 1 centrés dans les pulsions et l'agression.

La psore se caractérise sur le plan mental par une hyperémotivité ce qui cadre parfaitement avec la prépondérance de l'affect et de la séduction propre au groupe des 2, 3 et 4.

De ce simple schéma, nous pouvons commencer par mieux comprendre l'essence de chaque miasme. Nous sommes parti d'une connaissance parcellaire sur les miasmes, un peu comme un puzzle dont il manquait des pièces et par inférence et comparaison avec un système traditionnel nous avons pu trouver les pièces manquantes.

2/ Chaque miasme comporte trois "sous-groupes" :
Le miasme psorique comporte les types 2, 3 et 4.

Hahnemann lui-même avait montré le chemin, puisqu'à la fin de sa vie il relate dans une lettre avoir découvert un sous-groupe de la psore, qu'il avait nommé la pseudo-psore, renommée ensuite tuberculinisme par J.H. Allen. Le tuberculinisme correspondrait au type 2.

Le miasme sycotique comporte les types 5, 6 et 7.

Le miasme luétique comporte les types 8, 9 et 1. Le miasme cancérinique correspondrait au type 1.

A chaque type correspond un certain nombre de remèdes homéopathiques bien particuliers et ce n'est pas interchangeable. Par exemple, lycopodium et sepia sont deux sycotiques (groupe des mentaux), mais lycopodium est de type 7 et sepia de type 5. etc…

Le diagnostic du type va donc rendre le diagnostic du remède homéopathique incroyablement plus précis et profond.

3/ Les trois règnes sont semblables aux trois instincts de l'ennéagramme :
L'étude des caractéristiques des sous-types instinctifs dans l'ennéagramme et celles des trois règnes de notre matière médicale nous montre une analogie parfaite.

Végétal = social
Minéral = préservation
Animal = syntonie

Je vous présente quelques mots clés par règne :

Sous-type instinctif - Préservation de soi - Syntonie - Social
Règne - Minéral - Animal - Végétal
Caractéristiques - Moi et moi - Moi et l’autre - Moi et les autres
Quelques mots clés - Survie, sécurité - Compétition, rivalité - Acceptation, rejet

© Les trois instincts et les trois règnes – Frédéric Schmitt 2001.


Méthodologie de travail


Méthodologie générale
Ayant fait ces découvertes théoriques, il me restait à les vérifier dans la pratique. Ma méthodologie de travail a respecté les trois points mis en exergue dans le chapitre précédant, à savoir :

1. base diagnostique commune à tous les auteurs. Le dénominateur commun de chaque miasme retrouvé chez tous les auteurs se calque parfaitement avec les grandes caractéristiques des groupes de l'ennéagramme et lui donne un approfondissement et un éclairage important.

2. méthodologie de diagnostic miasmatique fiable, reproductible et la plus indépendante possible de la subjectivité du praticien. Sur ce point, l'ennéagramme est parfait puisqu'il est avéré qu'un type est objectivement reconnaissable par différentes personnes entraînées sans concertation.

3. Classification miasmatique des remèdes à posteriori.

J'avais donc tous les atouts en mains pour vérifier mon hypothèse suivant une méthodologie la plus scientifique possible.

Comme je pratiquais l’ennéagramme depuis quelques années, il m’était relativement aisé de reconnaître le type et le sous-type d’un patient et de faire les corrélations avec le remède homéopathique. Pour chaque malade j’essayais donc en plus du diagnostic homéopathique de diagnostiquer le type et sous-type sans à priori.

Prenons un exemple. Je vois une patiente à qui je donne depuis plusieurs années Kalium carbonicum avec succès. Je diagnostique un type 9 auto-préservation. Je mets en hypothèse le 9 auto-préservation pour kalium carbonicum. Si j’ai au moins trois cas de kalium carbonicum de type 9 auto-préservation, la probabilité pour que ce remède soit de ce type devient très forte.


Vérification des remèdes classés par Hahnemann et admis par l'ensemble de la profession.
La première étape fut de vérifier si la classification miasmatique des remèdes sur lesquels tout le monde s'accorde se vérifiait dans cette approche. En l'occurrence, Sulfur et Psorinum pour la psore, Thuya, Natrum Sulfuricum et Medorrhinum pour la sycose et Mercurius et Luesinum pour la luèse. Si cela ne fonctionnait pas pour ces remèdes, je ne pouvais continuer.

Cependant, très rapidement, je confirmais l'exactitude et le bien fondé de la classification de ces sept remèdes par le biais de l'ennéagramme. Voici donc les premiers résultats :

Psore - Sycose - Luèse
Psorinum : 3 - Thuy : 5, Natr-s : 6, Med : 7 - Merc : 8, Syph : 9

Quand je note que thuya est de type 5, cela signifie que j’ai eu plusieurs cas de ce remède dont la personne était de type 5. Je n'ai pas encore classé Sulfur de façon définitive.



Résultats actuels

* Un remède se trouve toujours classé dans le même type et sous-type. Exemple : Thuya est toujours classé dans le 5 social. Je n'ai encore jamais rencontré de contre-exemple où le même remède aurait entraîné une guérison de niveau miasmatique chez deux types ennéagrammes différents. Un remède ne peut donc appartenir qu'à une seule classe miasmatique. La reconnaissance du type et du sous-type permet d'orienter rapidement notre recherche du simillimum et donne des résultats très nettement supérieurs à l'ancienne méthode. Il s'agit en fait d'un premier tri avec deux portes d'entrée : le miasme et le règne.
* Zone de résonance vibratoire. Ceci est une explication de l'homéopathicité et de la notion de simile. Si le remède prescrit se trouve dans la "zone de résonance vibratoire", l'homéopathicité[4] sera suffisamment forte pour que le cas réagisse favorablement, par exemple, si on donne Sulfur à un type 8 auto-préservation (le 8 étant une des flèches du 2 type de Sulfur). C'est ce qu'on appelle un simile, mais il aura besoin d'être complété. Ceci est la principale raison de la cure en zigzag dont parle Kent.
* Guérison miasmatique et direction des symptômes : l'ennéagramme, en sus des critères habituels de guérison, nous donne une cartographie de la guérison miasmatique permettant de juger du niveau miasmatique ou non de la guérison. Ceci sort du cadre de cet article.


Stratégie miasmatique de prescription


Critique de la méthode répertoriale kentiste classique
La structure du répertoire est ainsi faite, que certains remèdes dits polychrestes sont statistiquement sur-représentés et inversement certains remèdes appelés improprement " petits remèdes " sont statistiquement sous-représentés. La méthode répertoriale classique, issue de l'enseignement de J.T. Kent, c’est un peu comme le scrutin à la majorité absolue, seul les gros peuvent être élus. Plus notre grille de répertorisation comprendra un nombre élevé de rubriques, plus la probabilité de sortir un petit remède sera faible. A l’inverse, un petit nombre de rubrique favorisera l’apparition de petits remèdes, la probabilité sera maximum avec l’utilisation d’une seule rubrique fiable. C'est l'écueil principal de cette méthode qui n'inclut pas la similitude miasmatique.

Une adaptation de la méthode répertoriale
La stratégie que j’utilise actuellement est donc la suivante :
1. Diagnostic du miasme (ennéatype) et du règne (instinct)
2. Diagnostic différentiel parmi les remèdes déjà classés. Ex. si le malade est 5 syntonie = ambra, sepia, asterias, carbo animalis.
3. Si le simillimum n'est pas parmi ces remèdes déjà classés, j'effectue la méthode kentienne classique, avec l'avantage toutefois de ne retenir dans ma grille de répertorisation que les remèdes appartenant au règne diagnostiqué.

Cas cliniques et photographies illustrant la méthodologie
Pour avoir accès à cette partie du site http://www.homeopathic-enneagram.com/, veuillez si vous êtes médecin, dentiste, pharmacien ou vétérinaire demander votre code d'accès à la partie réservée aux professionnels.

Intérêts


Prescription des polychrestes avec plus de précision
Compréhension plus élargie des polychrestes
Les polychrestes sont souvent prisonnier d'une image qui leur colle à la peau depuis des temps sans commencement. Un des plus bel exemple concerne psorinum. Ce remède a la réputation de convenir à des patients déprimés, frileux, perdants, avec des problèmes de peau importants. Or, cette situation est son aspect décompensé. J'ai un très beau cas de psorinum, chez un comptable qui avait des problèmes de dos depuis des années. C'est un patient très charmant, dynamique, comique et très travailleur chez qui il aurait été impossible avec l'ancienne méthode de découvrir psorinum. Or, le diagnostic miasmatique indiquait avec évidence un psorique 3 animal !

Augmentation de notre palette de remèdes
Pierre Schmidt disait qu'il traitait 80% de ces malades avec 50 remèdes polychrestes ! une observation honnête de notre pratique devrait confirmer cette statistique. Actuellement j'ai doublé cette palette puisque j'ai classé environ 100 remèdes sur la roue de l'ennéagramme homéopathique.

La fréquence de prescription des soi-disant "petits" remèdes en remède constitutionnel a augmenté énormément.

Meilleure connaissance des remèdes et des malades
L’avantage de cette méthode est que la prescription s’appuie sur une compréhension profonde du malade via les ennéagrammes. Nous atteignons une similitude miasmatique. Le support des ennéagrammes permet d’appréhender d’une façon globale et profonde la problématique du remède très rapidement. Prenons l’exemple de ma patiente Molybdenium. Sans l’apport de l’ennéagramme, le remède aurait pu éventuellement être trouvé. Mais la compréhension profonde de la problématique du remède aurait nécessité de nombreux cas. Il n'a fallu pas loin de 50 ans pour petit à petit découvrir Carcinosinum et l’établir au rang de polychreste. L’apport de l’ennéagramme nous permet de connaître rapidement l’essence d’un remède en profondeur. La problématique profonde des 1 est connue et tous les 1 minéraux auront un noyau similaire. Il suffira ensuite de repérer les spécificités propres à chaque remède en terme de problématique mentale et physique.

Eviter les erreurs grossières :
Il devient impossible de confondre lycopodium (ennéatype 7) avec nux vomica (1) ou sepia (5). De même Sulfur (2) ne peut plus être prescrit à un patient sycotique, ni natrum sulfuricum (6) à un patient psorique.

Permet des comparaisons inhabituelles
Comme thuya, natrum muriaticum et ambra griséa qui sont tous des types sycotiques 5.

Conclusions
L'application de la similitude miasmatique et de règne avec l'aide de l'ennéagramme a complètement transformé ma pratique quotidienne. J'aborde maintenant chaque cas sereinement avec une méthodologie fiable. Les résultats cliniques sont bien meilleurs.

Je fais le pari qu'un étudiant en homéopathie qui commencerait son apprentissage avec la méthode miasmatique basée sur l'ennéagramme aurait en trois ans des résultats similaires à ceux d'un homéopathe ayant 20 ans d'expérience avec l'ancienne méthode !
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Notes:
[1] Hahnemann, Samuel, Les maladies chroniques.
[2] Allen, J.H., Psora and pseudopsora., Jain Publishers.
[3] Broussalian, Georges, Ma réussite en homéopathie, Kurteglu Editions.
[4] Homéopathicité est un terme introduit par Granier dans son homéolexique qui signifie : degré de similitude entre un malade et un substance médicamenteuse.

Auteur: Dr. Frédéric Schmitt
Source: http://www.homeoint.org/articles/schmitt/enneagramme.htm
© Copyright Frédéric Schmitt 2003.

1 comentario:

Anónimo dijo...

Cher ami, pourriez-vous effacer le schéma intitulé "la roue de l'ennéagramme homéopathique" de mon article, car depuis sa rédaction il est devenu complètement obsolète.
Sinon je vous informe de mon site en français sur l'homéopathie www.homeopathie-marie.eu
et de notre site sur l'ennéagramme www.enneagramme-marie.fr
Très cordialement, Frédéric Schmitt